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Chavez fragilise les droits de l’homme au Venezuela

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La récente décision du président Hugo Chavez de retirer le Venezuela de la Commission interaméricaine des droits de l'homme et de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) suscite des protestations.

« Ce retrait constitue un affront pour les victimes de violations des droits humains et pour les futures générations de Vénézuéliens qui ne pourront plus faire appel à cette instance supranationale lorsqu'ils ne parviennent pas à faire valoir leurs droits dans leur pays », estime Amnesty International.

« La Commission et la Cour interaméricaines des droits de l’homme ont eu non seulement un impact extraordinairement positif sur les droits humains dans la région, mais ont servi d’exemple, car elles ont démontré au reste du monde à quel point les organes régionaux de droits humains peuvent être vitaux et efficaces », a déclaré Navi Pillay, haut commissaire des Nations unies aux droits de l’homme. Ces instances « ont rempli un rôle important dans l’histoire démocratique de la région, dans la protection des droits des groupes vulnérables, comme les peuples indigènes, les défenseurs des droits humains, les journalistes et autres », a rappelé Mme Pillay, qui demande à Caracas de revenir sur sa décision.

Chavez a jugé « aberrant » un arrêt de la Cour interaméricaine sur les mauvais traitements subis en prison par Raul Diaz, accusé de terrorisme.

Cependant, l’Observatoire vénézuélien des prisons (OVP) enregistre 5 370 morts de détenus et plus de 15 000 blessés depuis l’arrivée de Chavez au pouvoir, en 1999.

Selon Humberto Prado, directeur de l’OVP, le système interaméricain des droits de l’homme a favorisé la prise de conscience sur la crise pénitentiaire au Venezuela.

Chavez a qualifié la Cour interaméricaine de « néfaste, pourrie et dégénérée ». Caracas l'accuse d’être « au service de la politique impériale des Etats-Unis ». Or, les Etats-Unis  n’ont pas ratifié la Convention américaine des droits de l’homme. Cela n’a pas empêché la Commission de pointer du doigt, à de nombreuses reprises, la prison américaine de Guantanamo, à Cuba. Les juges de la Cour, basée au Costa Rica, sont Latino-américains ou Carïbéens.

Un tribunal impartial

Carlos Correa, de l’ONG vénézuélienne Espacio Publico, considère que « le gouvernement vénézuélien envoie un message à la communauté internationale : il réduit son engagement à l’égard des droits humains ». Selon l’ONG Provea (Programme vénézuélien d’éducation et action en droits humains), la Cour interaméricaine est un « tribunal impartial », un recours lorsque les autorités sont défaillantes. « Le retrait de la Cour est un préjudice pour le pays, surtout pour les victimes de violations des droits de l’homme », juge Provea.

« Le système interaméricain des droits humains a été et reste, depuis sa création, un acteur de changement, une garantie d’une plus grande protection des droits de l’homme dans la région, et un recours efficace pour assurer le plein exercice de tous les droits inscrits dans la Convention américaine », renchérit la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH). Human Rights Watch (HRW) s’est prononcé dans le même sens.

La Coalition internationale d’organisations pour les droits de l’homme dans les Amériques a lancé un appel en défense du système interaméricain des droits humains : « Il faut souligner le travail dirigé à la protection des personnes ou groupes vulnérables, la lutte pour l’éradication de la violence de genre et la discrimination sexuelle, la protection des peuples indigènes, l’interdiction de la torture et la pratique de la disparition forcée. » Et d’ajouter « la promotion, le développement et la garantie des droits économiques, sociaux et culturels ».

Des universitaires on écrit : « A l’époque des dictatures, des guerres civiles et de la violence armée interne, ainsi qu’à l’époque contemporaine des démocraties avec des problèmes structurels des droits de l’homme, la Commission, indépendante et impartiale, a été et continue d’être un instrument fondamental pour la protection de ces droits, par son soutien aux Etats – lorsque les conditions le permettent – et à ses habitants pour la promotion et la protection effective de leurs droits. Par la résolution d’affaires individuelles, de visites sur place, de rapports thématiques ou sur des pays, de mesures de prévention, la Commission remplit un rôle fondamental de dénonciation et d’alerte face aux menaces contre la démocratie et l’Etat de droit, tout en protégeant les droits des citoyens lorsqu’ils ne sont pas suffisamment assurés au niveau national. La Commission a sauvé et continue de sauver des vies ; dans le passé, elle a ouvert des espaces démocratiques : aujourd’hui, elle aide à consolider, renforcer et approfondir des démocraties plus égalitaires ; elle combat l’impunité et contribue à assurer vérité, justice et réparation aux victimes. »

Boaventura de Sousa Santos, professeur à l'université de Coimbra et figure de l'altermondialisme, a consacré une récente lettre ouverte aux gauches à la défense de la Commission et de la Cour interaméricaines des droits de l'homme.


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